Les notes de Mendelssohn

La dimension psychique de Sandra est une pièce maitresse de notre héroïne en quête d’elle-même. Elle a chois une analyse lacanienne. La parole et le mot sont importants et, Milo comme moi, l’avons expérimenté, poésie oblige. Sa personnalité s’est construite dans un équilibre héroïque. Mendelssohn se rapproche de l’un de nos amis, éminent analyste qui a accepté, non pas d’analyser Sandra des Vagues, mais, ce sur quoi, nous nous interrogeons toutes et tous : Quid de la guérison ?Je remercie ce « guérisseur efficient » pour son regard.

En tant que lacanien, le Dr Mendelssohn ne chercherait pas à « guérir » Sandra au sens médical ou comportemental, mais plutôt à lui permettre de mieux vivre avec ses désirs, ses manques, et sa propre structure subjective. La guérison, dans ce cadre, consisterait à transformer son rapport à elle-même et au monde, en suivant plusieurs axes :

  1. Accepter le manque et habiter le désir
  • Identifier l’ »objet petit a » : L’analyse aiderait Sandra à repérer ce qu’elle cherche inconsciemment dans ses fantasmes et ses relations (par exemple, Jules comme une figure de la liberté et de la sensualité idéale). Plutôt que d’essayer de combler ce manque, elle pourrait apprendre à le reconnaître comme moteur de sa créativité et de ses choix de vie.
  • Lâcher la compulsion de répétition : En prenant conscience des schémas qu’elle répète (relations conflictuelles avec des figures d’autorité, retours incessants chez le psy malgré sa rébellion), elle pourrait s’ouvrir à des façons nouvelles d’explorer son désir.
  1. Trouver une place dans le symbolique
  • Revisiter le « Nom-du-Père » : Sandra pourrait travailler sur son rapport ambivalent à son père, non pas pour lui pardonner, mais pour réinscrire cette figure dans le cadre symbolique. Cela pourrait stabiliser son identité et alléger son besoin de rébellion constante.
  • Transformer ses révoltes en expression artistique : Sa créativité pourrait être davantage investie pour explorer ses conflits intérieurs. L’écriture, les sculptures, ou les cadavres exquis qu’elle aime réaliser seraient reconnus comme des lieux où elle articule son rapport au symbolique.
  1. Rapprocher le réel et l’imaginaire
  • Confronter l’impossible : Lacan décrit le réel comme ce qui échappe toujours au langage. Sandra semble fascinée par des expériences sensorielles et tangibles (corps, érotisme, textures, fluides). Plutôt que de les fuir ou de les sublimer complètement, elle pourrait apprendre à y trouver des ancrages. Ces expériences, bien que fugaces, pourraient devenir des moments d’apaisement plutôt que des obsessions.
  • Revenir à la parole : Le travail analytique pourrait la pousser à mettre des mots sur ses sensations, ce qui créerait une passerelle entre le réel (ce qui lui échappe) et l’imaginaire (ses fantasmes).
  1. Repenser son transfert
  • Comprendre son rapport au thérapeute : La colère et l’ironie qu’elle projette sur Mendelssohn sont des expressions précieuses de son rapport au pouvoir et à l’autorité. En analysant ces sentiments, Sandra pourrait comprendre comment elle construit ses relations, en particulier avec des figures perçues comme supérieures.
  • Se repositionner dans le transfert : Si elle cesse de lutter contre Mendelssohn, elle pourrait réorienter son énergie vers une introspection plus profonde.
  1. S’approprier sa singularité
  • S’appuyer sur sa créativité : La sublimation, qui consiste à transformer des pulsions en productions culturelles ou artistiques, est déjà un mécanisme puissant chez Sandra. L’analyse pourrait renforcer cette voie pour qu’elle devienne un espace de liberté et de satisfaction.
  • Échapper aux attentes sociales : Sandra pourrait être encouragée à reconnaître et à accepter qu’elle ne se conforme pas nécessairement aux rôles traditionnels (fille, amante, artiste). Cette reconnaissance pourrait l’aider à mieux vivre avec ses choix de vie singuliers.
  1. Reconfigurer le lien avec l’Autre
  • Réduire la dépendance à l’autre : Jules et les autres figures masculines (ou maternelles) occupent une place importante dans son univers. Mendelssohn l’aiderait à reconnaître que ces figures sont des projections de son propre désir, et que l’accomplissement ne vient pas d’elles, mais de son propre processus interne.
  • Assumer ses contradictions : Sandra pourrait être amenée à voir que ses forces (créativité, intensité émotionnelle) découlent des mêmes conflits internes qui lui causent parfois de la souffrance.

Conclusion

Pour Mendelssohn, la voie de « guérison » de Sandra ne serait pas de la rendre « normale » ou de supprimer ses troubles, mais de lui permettre de mieux comprendre et habiter sa singularité. En acceptant ses contradictions, en donnant un sens à son désir et en renforçant son ancrage dans le symbolique à travers son art, Sandra pourrait parvenir à une forme d’apaisement et de liberté intérieure.

 

Lola Matisse